Dans cet article, nous vous expliquons en détail comment sont administrés, préservés et transmis les biens d’une personne sous tutelle, quelles obligations pèsent sur le tuteur et quelles précautions prendre pour garantir une gestion transparente et respectueuse des volontés de la personne concernée.
Toutes les décisions importantes sont encadrées par le juge des tutelles pour garantir la protection des biens.
Sommaire
ToggleQu’est-ce qu’une tutelle ?
La tutelle est une mesure de protection juridique prévue pour accompagner une personne majeure qui, en raison d’une altération de ses facultés mentales (comme l’Alzheimer) ou physiques, ne peut plus gérer seule ses affaires personnelles et patrimoniales. Décidée par un juge des tutelles, après une expertise médicale, cette mesure désigne un tuteur chargé de représenter la personne protégée et d’agir en son nom pour tout acte administratif, financier ou juridique nécessaire à la sauvegarde de ses intérêts. La tutelle est définie aux articles 440 à 476 du Code civil.
Elle est mise en place uniquement lorsque la perte d’autonomie est telle qu’aucune autre mesure moins restrictive ne suffit à protéger efficacement les biens et la personne.
Le tuteur peut être un membre de la famille, un proche ou un professionnel spécialisé (mandataire judiciaire à la protection des majeurs). Son rôle est encadré par la loi et contrôlé par le juge des tutelles afin de garantir une gestion honnête et transparente du patrimoine de la personne sous tutelle.
Gestion des biens d’une personne sous tutelle : qui en a la charge ?
Lorsque qu’une personne majeure est placée sous tutelle, la gestion de ses biens incombe principalement au tuteur désigné par le juge. La mission du tuteur est claire : protéger au mieux les intérêts patrimoniaux et personnels de la personne sous tutelle, en respectant strictement les obligations fixées par le Code civil.
Concrètement, le tuteur administre les biens de la personne protégée : il perçoit ses revenus, règle ses dépenses, s’assure du bon entretien de son logement et prend toute décision utile pour préserver son patrimoine. Certains actes importants dits de “disposition”, comme vendre un bien immobilier ou réaliser un placement financier conséquent, nécessitent toutefois une autorisation préalable du juge des tutelles, afin de prévenir tout abus ou erreur de gestion.
Au-delà de l’aspect financier, la charge du tuteur s’étend à des tâches pratiques du quotidien : réception et suivi du courrier, démarches administratives, suivi des prestations sociales ou médicales. Il est également l’interlocuteur privilégié du corps médical, informé de toute décision de santé majeure concernant la personne protégée.
Le tuteur agit comme un véritable lien entre la personne sous tutelle, ses proches et le juge des tutelles. Il doit notamment signaler tout changement de situation importante : évolution de l’état de santé rendant possible une autonomie partielle, déménagement ou décès de la personne protégée.
Par ce rôle de contrôle et de relais, la loi garantit que la gestion des biens d’une personne sous tutelle reste toujours transparente, justifiée et orientée vers l’intérêt exclusif de la personne vulnérable.
Les biens d’une personne sous tutelle : ce qu’il faut savoir
Être placé sous tutelle ne signifie en aucun cas perdre la propriété de ses biens. Une personne sous tutelle conserve l’intégralité de ses droits de propriété : maison, comptes bancaires, meubles, véhicules, objets de valeur… Cependant, elle ne peut plus en assurer seule la gestion. Le rôle du tuteur est précisément de protéger ce patrimoine et de l’administrer dans le seul intérêt de la personne protégée.
Quels biens sont concernés ?
La mesure de tutelle couvre l’ensemble du patrimoine du majeur protégé :
- Biens immobiliers : résidence principale, appartement, terrain…
- Biens mobiliers : meubles, véhicules, objets personnels
- Comptes bancaires et placements financiers
- Revenus : salaires, pensions, rentes
- Bijoux et objets de valeur
- Parts sociales ou actions détenues dans une entreprise
Droits de la personne protégée sur ses biens
Même sous tutelle, la personne peut continuer à utiliser ses biens personnels (vêtements, objets usuels, mobilier, argent de poche ou équipements de loisirs) pour ses besoins quotidiens. Si son état de santé le permet, la personne protégée doit être informée et consultée pour les décisions importantes concernant ses biens.
Toutefois, le tuteur reste décisionnaire final et doit veiller à respecter au maximum les souhaits du majeur protégé.
Gestion des biens immobiliers
Le logement principal est protégé en priorité. Tout est mis en œuvre pour que la personne sous tutelle puisse y demeurer tant que sa sécurité et son bien-être le permettent. Si ce maintien à domicile devient impossible, le bien peut être loué pour financer les frais d’hébergement, sous la responsabilité du tuteur.
Toute vente immobilière nécessite l’autorisation expresse du juge des tutelles et une évaluation préalable. Le produit de la vente doit toujours être réutilisé dans l’intérêt direct de la personne protégée (par exemple, pour financer un hébergement ou un soin spécifique).
Le tuteur doit également veiller à l’entretien des biens : petits travaux ou réparations urgentes peuvent être réalisés directement, mais des travaux plus conséquents requièrent l’accord du juge.
Gestion des biens mobiliers et objets personnels
Les meubles, effets personnels et objets de valeur sont inventoriés dès le début de la tutelle. Les biens de faible valeur peuvent être gérés librement, mais la vente d’un bien de valeur (bijou, voiture) nécessite l’accord du juge.
Par exemple, un meuble de moins de 150 € peut être cédé sans autorisation.
Si la personne protégée ne peut plus conduire, son véhicule peut être vendu ou conservé, selon ce qui est le plus judicieux.
Comptes bancaires et placements financiers
Le tuteur administre les comptes bancaires et gère les revenus de la personne sous tutelle. Il doit privilégier des placements sûrs et ne peut pas clôturer un compte ni engager d’acte de disposition important sans autorisation judiciaire.
Les placements risqués ou spéculatifs sont interdits, même avec accord.
Que se passe-t-il en cas de décès de la personne sous tutelle ?
Le décès d’une personne sous tutelle met fin automatiquement à la mesure de protection, mais ouvre aussitôt une nouvelle étape essentielle : la gestion de la succession. À partir du décès, le tuteur agit non plus pour représenter la personne mais pour organiser légalement sa succession.
Jusqu’à la clôture complète, le tuteur reste responsable de certaines démarches pour garantir que les biens de la personne décédée soient transmis conformément à la loi et aux éventuelles volontés testamentaires.
Déclaration de succession : une obligation légale
Après le décès, le tuteur doit établir la déclaration de succession dans un délai de six mois et la déposer auprès du centre des impôts. Cette déclaration récapitule l’ensemble du patrimoine du défunt (biens immobiliers, comptes bancaires, dettes, créances) et sert de base pour calculer les droits de succession dus par les héritiers.
Le tuteur veille également au règlement de ces droits dans les délais, afin d’éviter toute pénalité de retard.
Les droits des héritiers : transparence et respect
Les héritiers, qu’ils soient enfants, conjoints ou autres ayants droit, disposent de droits garantis sur la gestion et le partage des biens. Ils peuvent, le cas échéant, contester le contenu de la déclaration de succession s’ils estiment qu’elle est incomplète ou inexacte. Pour prévenir tout conflit, le tuteur doit agir avec transparence, fournir les justificatifs nécessaires et tenir les héritiers informés à chaque étape.
En présence d’un testament, le tuteur doit également veiller à ce que les legs particuliers soient remis aux bénéficiaires désignés, conformément aux dernières volontés de la personne défunte.
Partage et liquidation de la succession
Une fois tous les biens et dettes recensés, le tuteur procède, avec le notaire, à la liquidation de la succession. Les héritiers se partagent alors l’actif net selon les règles légales ou les dispositions testamentaires. En cas de désaccord entre héritiers, Le tuteur ne tranche pas les litiges, mais peut assister le notaire ou informer le juge en cas de blocage. Le juge des tutelles ou le tribunal judiciaire peut être saisi pour trancher.
La clôture de la tutelle : la fin de la mission du tuteur
Lorsque la succession est réglée, le tuteur doit présenter les comptes de clôture et transmettre un inventaire final aux héritiers ou au notaire en charge. Cette étape doit être réalisée dans les trois mois suivant le décès. Ce compte doit suivre les mêmes règles que le compte annuel de gestion.
Une fois ces formalités accomplies, la tutelle est officiellement clôturée et le rôle du tuteur prend fin.
Absence d’héritiers : la succession vacante
Si la personne décédée sous tutelle ne laisse aucun héritier, le tuteur doit en informer le Domaine (service de l’État chargé des successions vacantes). L’État devient alors curateur de la succession : il établit l’inventaire, procède à la vente des biens et règle les dettes éventuelles. Il ne s’agit pas ici d’une mesure de curatelle, mais d’un rôle spécifique confié à l’État pour gérer les biens sans héritier.
A retenir
- Propriété conservée : Une personne sous tutelle reste pleinement propriétaire de ses biens, mais leur gestion est confiée à un tuteur pour protéger ses intérêts.
- Rôle du tuteur : Le tuteur administre le patrimoine au quotidien, réalise l’inventaire, gère les revenus et prend les décisions importantes avec l’autorisation du juge si nécessaire.
- Patrimoine encadré : Biens immobiliers, comptes bancaires, objets de valeur… tout le patrimoine est protégé et géré selon des règles strictes, sous contrôle judiciaire.
- En cas de décès : La tutelle prend fin mais le tuteur poursuit sa mission jusqu’à la transmission des biens aux héritiers ou au Domaine en l’absence d’héritier.
- Contrôle et transparence : Chaque étape est encadrée pour garantir que les biens de la personne protégée soient utilisés et transmis dans son seul intérêt et dans le respect de la loi.